L’Oranger des Osages

L’Oranger des Osages

Maclura aurantiaca syn. M.pomifera

Voilà un petit arbre épineux, de la famille des mûriers (Moracées). Son nom commun l’attribue aux Osages, tribu indienne d’Amérique du nord – Arkansas, Texas, Oklahoma, Missouri, and Kansasb- qui l’utilisait pour de multiples usages. Teinture, haies défensives, fabrication des arcs… il était bon à tout. Un coup d’œil sur l’architecture arquée de ses branches montre qu’ils étaient bien adaptés à ce dernier usage… Son nom vernaculaire outre Atlantique, bodark, rappelle-t-il que la tribu des Osages fut en contact avec des colons français ?

L’espèce est dioïque, avec des pieds mâles et des pieds femelles, aux drôles inflorescences hérissées de longs styles.

Le maclura a été découvert par Lewis et Clarke en 1804 dans la région du fleuve Mississipi.

C’est le pépiniériste parisien Cels qui, d’après Alire Raffeneau-Delile (1), l’a cultivé le premier en France à partir de 1820.

Mais ce dernier, qui fut vice-consul de France en Caroline du Nord, semble lui aussi être mêlé à l’affaire… En 1819 il est nommé directeur du jardin des plantes de Montpellier. En 1822 il plante dans l’Ecole forestière l’un des deux rejets de souche d’un arbre de Baltimore, qui lui avaient été envoyés en 1821, par Elias Dunand, pharmacien botaniste français, par l’intermédiaire de Cels. « Cette multiplication végétative avait conduit à ce qu’il n’y ait que des individus femelles qui fleurirent pour la première fois en 1827 à Montpellier alors que sous le climat moins favorable de la région parisienne, ils ne fleurirent qu’en 1831. Delile réussit à obtenir un maclura mâle, par l’intermédiaire d’un pépiniériste des environs de Tarascon, M. Audibert. L’arbre provenait des pépinières new-yorkaises de William Price »(2).

Plantés côte à cote dans l’école forestière du jardin de Montpellier, on raconte que les deux pieds se sont alors rapprochés l’un de l’autre. Mais le pied mâle a été abattu par le vent en 1991. Sa « veuve », comme l’appelait le professeur Jarry, alanguie en position horizontale, a engendré un processus de réitération, que l’on ne peut manquer de remarquer. Ce processus utilisé par les orangers des Osages leur permet de se reproduire par voie végétative dans des conditions difficiles.

Dans son jeune âge, le maclura est très épineux et le jardin des Plantes a pu le proposer pour former des haies défensives. On retrouve parfois dans les vieux mas des environs de Montpellier, en limite de propriété, des alignements de macluras témoignant de cet usage (2).

De part son appartenance à la famille des mûriers, de nombreux essais ont été effectués, tant en France qu’en Italie, pour utiliser son feuillage dans l’élevage des vers à soie. Moins sensible au gel que le feuillage du mûrier, des espoirs avait été fondés sur le remplacement de celui-ci.

En avril 1834, le botaniste Matthieu Bonafous, directeur du jardin royal d’agriculture de Turin est à Montpellier. Depuis 1824 il recherche une nourriture de substitution pour les vers à soie. En effet, cette année-là des gelées tardives de printemps ont grillé les feuilles de Mûrier blanc qui constituaient la seule nourriture des chenilles. Les feuilles du Maclura donnent un excellent résultat et Bonafous rédige un mémoire de ses recherches pour l’Académie des Sciences.

Mais Delile a montré dans un rapport édité par la société d’Horticulture de l’Hérault en 1835, qu’il n’était pas possible d’utiliser cette nourriture durant tout le cycle de croissance des Bombyx mori sous peine de les voir dépérir avant qu’ils ne produisent leur cocon.

Le maclura ne fut pas pour autant vraiment abandonné mais planté comme arbre d’ornement.

Tout au long du XIXe siècle il fut à la mode dans les parcs de style paysager, notamment dans le sud de la France. Ainsi le retrouve-t-on au jardin de la Fontaine de Nîmes, dans de nombreux parcs montpelliérains tel celui du château de Flaugergues, tout comme aux Buttes Chaumont.

A partir de 1934 aux États-Unis, il fut à nouveau l’objet de culture intensive. Sous la présidence de Roosevelt furent mis en lui tous les espoirs pour sauver l’agriculture en contrant les tempêtes de poussières pour prévenir l’érosion des sols dans la région des Grandes plaines. Près de 30 000 kilomètres de haies d’oranger des Osages, 220 millions d’arbres, ont été alors plantés.

Il est aujourd’hui encore présent ça et là, témoin de toute cette histoire, dont le temps à quelques fois enjolivé certains épisodes. J’ai pu lire, il y à longtemps, dans un bulletin de la société d’Horticulture du Gard, que l’on pensait que c’était le Marquis de Baroncelli qui avait fait planter des Orangers des Osages dans les parcs de Provence en témoignage de son amitié avec les Sioux…

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(1) Alire Raffeneau-Delile, « Mémoire sur le Maclura aurantiaca… », Bulletin de la société d’agriculture du département de l’Hérault, juillet 1835, p. 189-203.

(2) François Michaud, Botanique et voyage des plantes : le rôle du Jardin des Plantes de Montpellier dans la connaissance et la diffusion de quelques exotiques. In : Journée d’étude organisée dans le cadre des Rendez-vous aux jardins 2008 par la Direction de l’architecture et du patrimoine et le Conseil national des parcs et jardins, 6 février 2008.

(3) Rapport des collégiens de Roquemaure dans le Gard, guidés par leur professeur de Sciences naturelles, Claude Nova, en collaboration avec une classe de collège du Québec. 2007

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