Et si nous parlions du parfum des fleurs…

Et si nous parlions du parfum des fleurs…

Six heures… Du moins c’est ce qu’affirme le tabac blanc. Mais le tabac blanc est sujet à erreur. Il sera six heures quand j’aurais décrété qu’il est six heures. Alors seulement la terrasse, le jardin, et l’univers entier suffoqueront de mon parfum.

Monologue du gardénia – Pour un Herbier – Colette

Si nous connaissions le langage des plantes, nous pourrions déchiffrer les messages parfumés qu’elles envoient au monde. Plus la recherche avance, plus les chercheurs sont persuadés que les substances chimiques volatiles libérées par les plantes dans l’atmosphère peuvent être considérer comme un langage.

Des essences aromatiques synthétisées à partir des sucres issus de la photosynthèse et des nutriments puisés dans le sol, dont quelques familles ont fait leur spécialité :

Les Lamiacées : le thym, la lavande, la sauge, la menthe, le romarin, l’origan, la marjolaine, le basilic, la sariette…
mais aussi le patchouli ;

Les Myrtacées : eucalyptus, giroflier…

Les Rutacées : tous les agrumes mais aussi la rue ;

Les Cupressacées : cyprès, genévriers, cèdres…

Les Abiétacées : sapin, pin, cèdre…

Les Apiacées : coriandre, fenouil, anis…

Les Astéracées : camomille, armoise, estragon, hélichryse…

Les Lauracées : laurier noble, cannelle de Ceylan, bois de rose, camphrier…

Les Géraniacées : géranium bourbon et géranium rosat…

Les Myrtacées : myrte, niaouli, melaleuca (tea tree)…

©Véronique Mure

©Véronique Mure

©Véronique Mure

Quelle est l’utilité des parfums pour la plante elle- même ?

  • Beaucoup de plantes se servent des parfums comme moyen de séduction et attraction des insectes pollinisateurs leur permettant ainsi d’assurer leur reproduction
  • Elles s’en servent également de moyen de protection, et ont de ce fait des propriétés antifongiques antivirales, antibactériennes ;
  • Ils pourraient aussi permettre aux plantes de communiquer entre elles et 
constituent une réserve d’énergie mobilisable par exemple en cas de conditions climatiques défavorables.

Les plantes : de petites usines à parfum

Les parfums floraux ne sont pas libérés de façon diffuse, mais émis par des organes précis, les osmophores. à différentes heures de la journée selon les espèces. A partir de cette observation, certains ont établit une horloge florale qui fonctionnerait à l’odeur…Les osmophores sont généralement constitués par un épiderme à caractère glandulaire. L’observation attentive d’une fleur de lavande ou d’une fleur de citronier, révèle qu’elle est couverte de minuscules points d’une transparence ambrée ; chacun d’eux est un trichome glandulaire gorgé d’essence.

Fleurs de citronnier ©Véronique Mure

Pour assurer à tout prix leur pollinisation, les fleurs qui utilisent les animaux comme vecteur, la zoogamie, doivent exercer un attrait sur le pollinisateur dont elles dépendent. Plusieurs types d’attrait sont alors utilisés : l’attrait visuel avec des pièces florales spécifiquement colorées, le refuge ou l’alimentation, mais aussi l’attrait olfactif qui nous intéresse ici.

Le parfum des fleurs a donc un rôle d’attraction pour le pollinisateur, voire même quelquefois un rôle de guide vers le cœur de la fleur, siège de la reproduction. Bonnes ou mauvaises, voire même fétides dans certain cas, chaque type d’odeur correspond à un pollinisateur précis.

Les plantes pollinisées par les chauve-souris, dites cheiroptérogames, possèdent des fleurs solides produisant beaucoup de nectar. Le Baobab est l’une d’elle. Ses fleurs s’ouvrent à la nuit tombante dégageant une odeur forte, proche de celle des chauve-souris. C’est une odeur de même nature qui attirent les Coléoptères qui aiment les odeurs de décomposition. Les fleurs nauséabondes, sont, quant-à-elles, adaptées aux Diptères (les mouches). Certains lépidoptères, papillons de jour, sont accueillis par des fleurs parfumées à odeur fraîche et agréable émise en pleine journée et colorées (lilas, jacinthe, œillet, chèvrefeuille) tandis que ceux de nuit sont attirés par des fleurs au parfum lourd. De tous ces insectes ce sont les Coléoptères les plus actifs, mais les hymnoptères, et surtout les abeilles, les suivent. Pour elle, les fleurs se parent de pièces florales colorées et parfumées à odeur fraîche et sucrée, avec de marques invisibles pour d’autres (apparaissant à la lumière ultraviolette), et des étamines judicieusement disposées pour déposer le pollen sur la tête ou le corps des butineuses.

Avec une extrême ingéniosité les ophrys exploitent même les comportements sexuels des insectes pour les attirer. Dans ce cas, la fleur tire parti de l’avidité des mâles à la recherche de femelles (la floraison a lieu à une période où, après l’envol des mâles, les femelles sont encore absentes). L’orchidée peut alors mimer la femelle elle même de l’insecte, ce qui constitue une incroyable performance. Dans ce cas, son odeur transmise par un cocktail de phéromone, son apparence et sa pilosité sont reproduits jusque dans les moindres détail pour attirer les mâles.

Les fleurs perdent-elles leur parfum ?

Une étude de 2008 suggère que la pollution atténue le parfum des fleurs perturbant la vie des insectes et mettant en danger l’approvisionnement alimentaire.

Les chercheurs de l’Université de Virginie affirment que la pollution réduit de façon spectaculaire la distance parcourue par le parfum des fleurs. Pour le professeur José Fuentes les composés organiquesvolatilesproduits par les fleurs dans un environnement peu pollué peuvent se répandre sur à peu près 1.000 à 1.200 mètres. Mais aujourd’hui, elles peuvent circuler seulement sur 200 à 300 mètres. Cela rend la localisation des fleurs de plus en plus difficile pour les abeilles et les autres insectes.

D’autres scientifiques ont travaillé sur l’odeur dégagée par les gueules-de-loup. Ils ont constaté que les molécules sont instables et se lient rapidement à des polluants comme l’ozone et les radicaux nitrate, formés surtout dans les émissions des véhicules. Cela modifie chimiquement les molécules, et l’odeur des fleurs. Un cercle vicieux s’installe les insectes ayant du mal à obtenir assez de nourriture et les plantes n’étant pas assez pollinisées pour proliférer.

Les fleurs auront-elles retrouvées leurs parfums ce printemps .

Fenouil ©Véronique Mure

Ronce ©Véronique Mure

Sumac ©Véronique Mure

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