Le jardin de résistance de Gilles Clément

Le jardin de résistance de Gilles Clément

Les jardins de résistance (Gilles Clément – 2009)

Rêve en sept points pour une généralisation des jardins de résistance

Par jardin de résistance il faut entendre l’ensemble des espaces publics et privés où l’art de jardiner – qu’il s’agisse de jardins vivriers ou de jardins d’agrément, de parcs urbains ou d’espaces d’accompagnement de la ville, de territoires appartenant au tissu de la cité ou à celui de la campagne – se développe selon des critères d’équilibre entre la nature et l’homme sans asservissement aux tyrannies du marché mais avec le souci de préserver tous les mécanismes vitaux, toutes les diversités – biologiques ou culturelles – dans le plus grand respect des supports de vie ( eau , sols , air ) et dans le plus grand souci de préserver le bien commun et l’humanité tributaire de ce bien commun.

A travers les jardins de résistance se définit un art de vivre qui ne concerne pas seulement la question du jardin mais, d’une façon globale, le rapport de l’homme à son environnement social et biologique où, selon les critères issus du  Jardin en Mouvement   l’économie de vie consiste à  faire «  le plus possible avec et le moins possible contre les énergies en place  ». Cela s’applique aux gestes quotidiens dans tous les domaines d’action. La notion de résistance trouve son extension possible à tous les niveaux. Ce faisant  il convient de se tenir en permanence en alerte afin de ne pas se trouver emporté par le flux consumériste, les idéaux de développement et les tromperies empruntant au langage de l’écologie pour, en réalité,  en faire un objet marchand.

Les jardins de résistance développent des techniques précautionneuses de l’environnement. Ils proposent de vivre selon un mode peu consommateur des biens communs et, sur ces bases, élaborent les règles d’une  économie nouvelle.

Celle-ci résulte de deux mécanismes antagonistes :

  • l’un des mécanismes, le brassage planétaire des êtres et des systèmes issus des échanges distants , aboutit à une série de réajustements biologiques et sociétaux : les écosystèmes émergents.
  • l’autre mécanisme, la relocalisation des échanges et des systèmes de distribution, permet de placer en situation minimales les coûts globaux de production (ou de gestion) et, partant, de limiter les pollutions diverses et le bilan carbone à leur part la plus réduite.

Le brassage planétaire multiple les rencontres et les échanges entre les êtres et les systèmes culturels  historiquement isolés les uns des autres. Des rencontres et des échanges résulte une hybridation naturelle et culturelle participant au mécanisme global de l’évolution.

La relocalisation des échanges et des systèmes de distribution issue du brassage planétaire doit être interprétée comme le versant le plus significatif de  l’économie émergente nécessairement induite par les nouvelles configurations d’échanges (les écosystèmes émergents) mais aussi par les nouvelles urgences : dépenser moins et juste , consommer moins et juste , développer une dynamique du partage.

L’économie émergente des jardins de résistance intègre de ce fait  deux dynamiques opposées :

  • l’une associée aux échanges distants induisant la dépendance
  • l’autre associée aux échanges locaux permettant l’autosuffisance

L’économie émergente des jardins de résistance ne privilégie pas l’une ou l’autre de  ces deux dynamiques en tant que volumes échangés mais elle se positionne par rapport à la dépendance et à l’autosuffisance en postulant que :

  • les échanges non vitaux se trouvent associés à la distance donc à la dépendance . Un accident de distance aurait sur l’économie émergente un impact circonstanciel non significatif et ne la mettrait pas en péril.
  • les échanges vitaux se trouvent associés au local donc à l’autosuffisance . Un accident de distance ne saurait en altérer le fonctionnement.
  • aucun des échanges vitaux ou non vitaux envisagés dans le cadre des jardins de résistance ne sont supposés contribuer à la dégradation des équilibres biologiques et sociétaux.

D’ores et déjà les jardins de résistance existent sur la planète sous forme atomisée. L’atomisation du système répond à la logique de l’autosuffisance qui ne justifie pas, a priori, de mise en réseau.

Dans le cadre d’une politique valorisant les principes de l’économie émergente issue des jardins de résistance et , plus généralement de la notion de  Jardin planétaire,  il deviendrait nécessaire de fédérer le système sans le dévoyer de ses objectifs par un carcan législatif mais en lui fournissant les moyens de la coordination pour :

  • établir des échanges équitables
  • développer des plates formes d’échanges artistiques et scientifiques de haut niveau
  • d’une façon générale , favoriser les échanges de biens immatériels issus de la diversité culturelle sur la planète

L’atomisation du système joue en faveur de la résistance car, ainsi, il se rend difficilement saisissable.

 


La Vallée  © V Mure
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Gardens of Resistance – Gilles Clément, 2009

A Dream in Seven Points for Gardens of Resistance

  • A garden of resistance is an area, public or private, where the art of gardening – for sustenance, pleasure, parks or other programs of accompaniment,    urban or rural –is practiced in harmony with nature and man, free of market domination. Diversity, both biological and cultural, as well as the   preservation of water, soil and air is encouraged for the common good.
  • A garden of resistance is part of  a life style that, in a larger sense,  reflects the relationship between man and his socio-biological environment . As in the Garden in Motion,   this relationship, or theeconomy of life,does as much for and as little against existing energies. This applies to daily acts in all domains and is relevant at all levels. However, a constant state of alert must be maintained in order to avoid confusing consumerist values with ecology.
  • Environment friendly practices emerge from gardens of resistance. They propose a way of life that is not wasteful of the common good as a basis for a new economy.

            This economy is the confrontation of two processes:

-One is the  planetary stirringof all living things  and of distant exchange systems, leading to a series of biological and social readjustments : emergent ecosystems.

– The other, delocalizationof exchange and distribution systems, minimizes global production and management costs, hence controlling pollution and carbon balance.

Planetary stirring multiplies exchanges and encounters between beings and cultures traditionally apart.  These encounters produce the natural and culturalhybridizationinvolved in the global process of evolution.

The delocalisation of exchange and distribution systems resulting from planetary stirring is an important aspect of the emergent economy, composed of  new patterns of exchange (emerging ecosystems) and of new priorities: spend less and better, consume less and better, establish a dynamic sharing process. 

  • The emergent economy of gardens of resistance consolidates two opposing forces:
  • One is connected to distant exchanges, generating dependence
  • The second , connected to local exchanges, allows self-sufficiency

The emergent economy of gardens of resistance does not favor one or the other with      regard to bulk exchange but establishes the frontier between dependency and self-sufficiency affirming that :

  • Non-vital exchangesare tied to distance and dependence. A distant accident would only     have an   incidental impact upon the emerging economy and would not place it in danger.
  • Vital (or highly necessary)exchanges are linked to proximity, hence to self-sufficiency. A   distant accident would not modify performance.
  • None of the exchanges that could occur in gardens of resistance should, in principle,  contribute to the deterioration of the biological or social balance
  •  Gardens of resistance already exist on the planet in dispersed form. This dispersion (“atomization”) is the logical consequence of self sufficiency but does not necessarily require a network.

A policy favorable to the emergent economy, originating from gardens of resistance and in a larger  sense from the Planetary Garden, should federate a system with no legislative curbs in order to:

  • establish fair exchanges
  • establish forums for high level artistic and scientific exchanges 
  •  encourage the exchange of immaterial goods derived from   planetary cultural diversity

           Dispersion (“atomization”), difficult to apprehend, operates in favor of resistance .

  • As long as the belief persists that capitalism is the only possible model, its destructive presence must be energetically challenged by multiplying “resistances” on the planet, forming a Milky Way that gains in force and intensity with time.

The substitution of one system by another is not necessarily a deflagration but an implosion, an  irreversible shift from unjust to fairer distribution of imposition , from unjust to fairer  distribution of goods – at least statistically – and from the privatization of the common good towards their municipalization.

It then becomes possible to federate a dispersed “(atomized”) system and establish a political project in harmony with the planetary garden.

  • The Planetary Garden merges the Gardens of Resistance into a single concept. When resistance operates on a planetary level, a plan for humanistic ecologybecomes possible.

The Planetary Garden is based upon the notion of diversity, underlining humanity’s dependence  upon biological and non biological heterogeneity  and hence its vulnerability. A key question is “How to capitalize from diversity without destroying it?” Indeed, any modification of the ecological balance through human behavior, causing the disappearance of non human species, ultimately condemns mankind. A scientistic vision of the future, substituting technology for circumspect management of natural resources, could only precipitate the “garden” towards destruction.          

The Planetary Garden must federate comprehension of the living with intelligent use of technological assistance. It presumes a level of knowledgesufficient to run the garden by offsetting removal and return to the  milieuSymbiotic manis in a key position to maintain this balance while biotic potential continues to obey the evolutionary process.

Theoretically, these seven points open the way to new governance and, implicitly, prepare a new political program leading to the establishment of a novel government, complete with ministries and their responsibilities. As in a dream, the outline of a Constitution whose introductory articles establish the foundation for a society in which sharing and growth of knowledge supplant competition emerges.

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