Vers où s’en va la terre ?

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Vers où s’en va la terre ?

Nous avons voulu de la terre. Et ce fut la Bigotie ! Une terre périgourdine.

Photo J.C. Coutausse, 1976

Photo J.C. Coutausse, 1976

Une terre pas tout à fait en friche mais plutôt délaissée… au sens affectif du terme : «abandonnée, laissée sans secours, sans assistance, sans témoignage d’affection… »

Il y a si peu de temps pourtant, une cinquantaine d’année à peine, elle était encore productive, deux paires de vaches dans les près, vignes et maïs dans les champs, tabac séchant sous les charpentes…

Pas une exploitation intensive, c’est sur… Le Camillou ne forçait ni sur les engrais, ni sur l’arrosage, ni sur les travaux de sol… Alors le maïs était un peu court et épars… mais l’exploitation vivait !

Un jardin potager alimentait la famille en légumes verts et pommes de terre, le bois mort était ramassé pour la cheminée, le linge séchait sur les haies ou dans les prés…(1)

La Bigotie dans les années 1950 - Coll. Manou Vergne

La Bigotie dans les années 1950 – Coll. Manou Vergne

La Bigotie août 1958 - Coll. Manou Vergne

La Bigotie août 1958 – Coll. Manou Vergne

Mais – on ne le sait que trop – à l’aube du XXIème siècle, le monde paysan est un monde quasi révolu.

Alors quel lendemain pour cette terre ? Et quel avenir pour tous « ces témoignages infimes et retrécis d’un pays qui n’existe plus »(2). La campagne peut-elle exister sans les paysans ? Peut-on lui inventer un avenir au cœur de cette civilisation qui lui échappe ? Peut-on porter un regard neuf sur ses paysages ? Ce sont toutes ces questions que pose Jean-Michel Linfort à travers sa peinture et ses ouvrages. Des questions que nous nous sommes posés aussi.

Nous avons même essayé d’y répondre. Nous avons tenté de faire entrer la Bigotie de plain-pied dans le XXIème siècle, avec tous ses défis pour la planète. Parcelle après parcelle nous avons essayé de reconquérir ce bout de territoire abandonné. Verger, prés, mare, haies….

« Reconnue, chaque entité est traitée et différenciée. La mare, environnée de plantes recherchées, devient jardin aquatique. Les haies champêtres, parsemées de rosiers botaniques, donnent un attrait supplémentaire aux abords des prés. Dans sa simplicité très élaborée, au-delà de l’engouement actuel pour les prairies fleuries chamarrées, la Bigotie exprime une vision nouvelle : une compréhension du végétal libre dans l’espace, un esprit d’avenir basé sur une connaissance réelle du comportement des végétaux mis en associations. »(3)

Nous avons aussi tenté de préserver, comme autant de trésors, les signes éparts de son histoire.

portail

chaise

brouette

Dix ans après, que dire ? Nous nous sommes donnés à cette terre jusqu’à l’épuisement. En échange elle nous a donné la force d’avancer et surtout elle nous a offert tant de bonheur. Mais nous le savons bien, tout cela est fragile… Et c’est ce sentiment de fragilité qui domine. Un instant d’inattention et voilà la belle qui se laisse envahir par l’herbe et la broussaille. Et si l’instant dure, c’est la forêt qui assez vite s’imposera et une autre histoire qui s’écrira.

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(1) V. Mure, Les jardins de la Bigotie, petit traité de biodiversité appliqué, Ed. Atelier Baie – 2010

(2) J.M. Linfort, Vers où s’en va la terre, Ed. l’Aube – 2000

(3) E. Sander, F. Phiquemal, Dans les jardins du Périgord, Ed. Ulmer – 2010

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Ils sont 2 commentaires

  1. veronique

    Merci Chantal. Cet article fait suite à une conférence de Jean-Michel Linfort, suivie hier à Domme, intitulée « Du Périgord des peintres au Périgord des fermes ». Je suis sûre que cela t’aurait passionné.


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