Les paysages agraires de la Gaule romaine

Les paysages agraires de la Gaule romaine

« La paix, dite romaine se concrétisa, entre autres, par l’application d’un système de mise en valeur des terres, donc des productions, absolument indéniable… Pour ce faire les Romains quadrillèrent le territoire par des voies de communication, par la rigoureuse découpe des terrains et enfin par la création des « villae ».

Il ne restait plus ensuite, histoire de bien surveiller tout le pays et d’annihiler toute tentative de rébellion, que de distribuer ces propriétés aux vétérans anciens légionnaires, mais aussi aux partisans de l’ordre romain. Désormais, l’affaire était jouée. Et elle le fut d’autant plus rapidement et irrémédiablemnt que toute la Gaule était administrativement très surveillée et régie par les mêmes lois qui existaient à Rome et qui avaient fait leurs preuves. » (C. Michelet, « Histoires des paysans de France »)

Emprise agricole à l’époque romaine.

« Les Romains trouveront en place un système agraire dans lequel s’amalgament traditions locales et apports méditerranéens » (Leveau & al.)

Dès la fondation de Narbonne (118 av.n.è.), l’implantation d’agriculteurs romains sur des terres gauloises est attestée (M.Py, 1993), et si les plaines et notamment les plaines littorales, la costière et la vallée du Rhône ont fait l’objet d’une véritable oeuvre de « conquête agricole », (la centuriation), l’occupation romaine n’a pas systématiquement expulsé les populations indigènes. On considère plutôt que les Romains ont profité des terres laissées inoccupées par une agriculture traditionnelle peu consommatrice d’espace. On note alors l’existence de deux types de cultures complémentaires : les cultures de plaine et les cultures de pente.

Les pentes étant plutôt occupées par une population rurale, abritée dans de petites fermes isolées ou groupées en hameaux directement issus de l’âge du fer, qui en aurait accéléré la mise en culture (Leveau et al.).

Les terroirs situés à plus de 200 m restent méconnus par l’archéologie. Il semble qu’il faille y voir le signe d’une exploitation différente car les ressources de l’arrière pays (métaux, bois, élevage) n’étaient pas négligées à l’époque romaine. (C.Raynaud, Histoire du Gard)

Centuriation et cadastration

La romanisation du paysage est intimement liée avec la mise en oeuvre d’une véritable politique agricole maillant les plaines et les vallées d’un parcellaire régulier et orthogonal : la centuriation. La réalisation de ce parcellaire volontariste, fondé sur une nouvelle répartition et redistribution des terres, apparait comme le premier marqueur de la prise de possession du territoire par Rome.

Antérieure à la diffusion du système agraire fondé sur la villa, la centuriation avait plusieurs fonctions : la première, fonctionnelle, pour fixer le statut des terres (à l’image des traités d’agronomie prônant la rationalisation pour dégager de meilleurs rendements) la deuxième, politique, (marque la propriété de Rome), la troisième, fiscale, (sert d’assiette à la taxe foncière), (C.Raynaud, Histoire du Gard, non publié).

L’organisation se faisait en damiers selon le module généralement carré de la centurie (710 m de côté environ), subdivisée en parcelles sur la base de l’actus (35,48 m).

(1 centurie = 20 x 20 actus ; 16 centuries (4×4) = un saltus)

On a distingué trois grandes périodes dans l’organisation des parcelles de la Gaule transalpine.

. La première correspond à la mise en place de la présence romaine, dès les premières assignations de Narbonne et l’aménagement de la via Domitia.

. La deuxième correspond aux déductions coloniales césariennes.

. La troisième s’ouvre avec l’empire avec la volonté d’occuper le plus de terres possible. On assiste alors à la conquête des terres basses, littorales ou marécageuses, grâce à la mise en place de réseaux de drainage ainsi qu’à la progression des réseaux anciens vers les sols plus secs, collines et coteaux, garrigues et costière. Sur les costières de Nîmes, on connait 6 réseaux liés à cette époque. (Leveau et al.)

Même remaniés par deux millénaires d’occupation agricole, nos paysages livrent encore aujourd’hui des traces des états les plus anciens. Routes, chemins, limites parcellaires, fossés, canaux… respectent les tracés établis par les arpenteurs romains.

Les limites

Bien qu’il soit difficile de savoir si les limites des parcelles étaient systématiquement marquées dans le paysage, on connaît, grâce à une littérature importante sur le sujet (Caton, Varron, Columelle, Pline, Virgile, Palladius,…) les différentes techniques utilisées à l’époque romaine pour enclore les champs.

Varron (Res Rusticae) décrit 4 modes de clôture (sceptum) :

  • La haie vive (saepes), plantée notamment d’épineux (ronces, aubépines, églantiers…) ainsi que de certains arbres majeurs, même si ceux-ci semblent plutôt délimiter un domaine qu’un champ.
  • La palissade de bois ou clayonnage de branches (plessis).
  • Le fossé bordant un talus intérieur, dont la fonction était aussi d’écouler les eaux et de les drainer.
  • Le muret de pierre sèche (dont on reparlera plus loin).

Si l’un ou l’autre de ces types de clôture était utilisés, il faut également imaginer qu’ils puissent aussi être associés, et complétés par un bornage très structuré.

Columelle, dans le livre X de son ouvrage, « De Re Rustica », explique comment tailler la vigne et les haies d’épineux en hiver ; mais c’est dans le livre XI que l’on trouve sa célèbre description de la façon de créer une haie composée de mûres sauvages, de roses et d’épines du Christ (Paliurus spina-christi).

Fermes et villae

Le phénomène des villae est caractéristique du haut Empire (courant Ier siècle de n.è.), avec une apogée dans le dernier quart du Ier siècle. A cette époque Nîmes connait sa plus grande période d’expansion.

L’Italie, cessant alors d’être simple consommatrice des productions gauloises, exporte ses techniques agricoles et instaure le système des villae (Leveau et al, 1993). Le Midi est ainsi pris dans la tourmente de ce qui peut être considéré comme une véritable révolution agricole, il lui faut alors adapter sa production à ce grand marché impérial.

La « villa » était une grande propriété à la « campagne » sur laquelle on trouvait un domaine agricole associant aux terres cultivées des terres de pâtures (garrigues) et, à proximité de la demeure, un ou plusieurs jardins composés avec art, intégrés aux beautés de la campagne environnante. (J.P.Le Dantec, « Jardins et paysages »)

« Longtemps considéré comme prédominante au sein de l’habitat gallo-romain, la place de la villa est aujourd’hui relativisée. Certes, l’habitat dispersé reste l’un des traits majeurs de la période mais c’est l’habitat groupé qui conserve une place centrale dans l’organisation des terroirs. » (C.Raynaud)

Les établissement agricoles ne furent donc pas tous des villae. Certains seront dénués de tout confort et voués exclusivement aux activité agraires s’apparentant plus à une ferme qu’à autre chose (Vici).

Ce sytème de production, certainement surdimensionné, commencera à régresser vers le IIème siècle et perdurera bon an mal an jusqu’au IIIème siècle. Plus que la disparition des villae, ce déclin annonce une mutation des équilibres économiques dictée par la crise impériale et la concurrence des produits africains, changement caractérisé par une réorganisation, voire un recalibrage, des systèmes d’exploitation des campagnes. On assiste alors à un regroupement du foncier (avec la concentration des richesses sur quelques villae) et à la diminution des centres d’exploitation dispersés. Et si les sites ne sont pas forcément désertés, la nature de leur occupation change (Leveau et al.1993), ce qui leur permettra de survivre jusqu’au Vème-VIème siècle, époque à laquel la rupture sera consommée.

Description de la villa d’Apollinaris, l’oncle de Sidoine Apollinaire située à Vorocingus, dans la vallée du Gardon (vers 430 – vers 490).

 » … J’ai fait le séjour le plus délicieux qui soit dans les propriétés si agréables des hommes les plus aimables de la terre, Ferreolus et Apollinaris. Leurs domaines ont des limites communes, leurs résidences sont voisines et la promenade qui les sépare, si elle fatigue un homme à pied, n’est pas assez longue pour qu’on la parcoure à cheval. Les collines qui s’élèvent au dessus des maisons sont cultivées en vignes et en oliviers : on dirait que c’est Aracynthe et Nysa, ces sommets célébrés dans les chants des poètes. L’une des demeures a vue sur un paysage plat et ouvert, l’autre sur les bois, mais leurs sites différents n’en procurent pas moins un égal plaisir « .

(d’après Lettre II, 9, de Sidoine Apollinaire  » Sidoine à son cher Donidius « ).

Les productions agricoles

Les systèmes agricoles furent inévitablement modifiés par l’avènement de l’agriculture « capitaliste » liée au système de la villa. Cependant les pratiques des agriculteurs indigènes au haut Empire ne devaient pas être fondamentalement différentes des époques précédentes.

La trilogie : céréale, olivier, vigne…

Les céréales

Les céréales constituent l’essentiel de l’agriculture et de l’alimentation.

Si certains graines et en particulier les glands, continuent d’être cueillis, le nombre de produits cultivés nouvellement introduits augmente. Pline dans le livre XVIII de son « Histoire naturelle » cite les blés, les céréales d’hiver, l’orge, le millet, le sésame, le panic, l’avoine ou encore le seigle. Les agriculteurs apprennent aussi à s’adapter à la qualité des terres et aux exigences du climat. Les terrains médiocres sont emblavés avec de l’épautre ou de l’orge à deux rangs, céréales très rustiques. De même que l’emploi des variétés d’hiver permet d’obtenir de meilleurs rendements dans les climats méditerranéens échappant ainsi à la chaleur estivale. Enfin les pratiques de fumures et amendement (dont le brûlis), sont attestées.

Si certains auteurs considèrent que les pratiques agricoles sont fondées sur des cultures monospécifiques (Leveau et al.), d’autres par contre considèrent à la lecture des écrits de Cicéron, que l’on peut trouver les céréales cultivées entre la vigne et l’olivier, ceci abaissant considérablement les rendements qui passe de 100/1 dans le nord de la France à 10/1 dans le Midi (Ferdière, 1988).

Stockées dans des caves, des silos enterrés ou dans des granges, les céréales sont ensuite grillées (pour les grains vêtus) et moulues grâce à des moulins domestiques à bras (entre 30 et 100 cm de diam.) ou des moulins rotatifs de plus grande dimension réservés à la meunerie ou à la boulange, et si le moulin à eau existe (ex. meunerie de Barbegal), il est peu courant.

La consommation des céréales se fait sous forme de bouillies, gruau, alica de fécule, polenta (orge), galette ou pain.

L’olivier

L’huile d’olive était dans l’antiquité la principale matière grasse, essentielle pour la cuisine mais également employée pour la toilette du corps ou l’éclairage des lampes.

Pline (75 de .n.è.) distingue jusqu’à 15 espèces d’olives et de nombreuses qualités d’huile, et s’il qualifie la production gauloise comme supérieure en qualité à celle d’Espagne, il ne semble pas que la Narbonnaise soit une grande région productrice d’huile par comparaison avec certaines régions ibériques ou italiennes (Leveau et al., 1993). L’oléiculture occupe une place florissante mais secondaire par rapport à la viticulture, destinée principalement à l’autoconsommation. Cependant, la découverte de pressoir à vis atteste de la présence d’installations spécialisées et Sidoine Apollinaire (Vème siècle) parle d’huileries dans les régions d’Arles, Narbonne ou encore Nîmes (Ferdière, 1988).

La vigne

La viticulture fut une des grandes productions de l’époque romaine, tournées vers le marché impérial, dont Marseille avait le monopole.

Les textes nous apprennent qu’en Narbonnaise, la vigne se développe au moins de la fin du Ier siècle av.n.é à celle du IIème, y jouant un rôle important dans l’économie de marché et l’exportation.

Le Gard est non seulement mentionné par les auteurs latins comme ayant un vignoble prospère, mais l’archéologie révèle aussi, autour de Nîmes et le long du Rhône, une dizaine d’ateliers produisant des amphores destinées au transport du vin (du Ie au IIe s., déclin au IIIe), dont la répartition laisse à penser qu’il s’agit de zones privilégiées dans lesquelles la vigne fit l’objet d’une culture extensive et spéculative orientée vers le marché de la ville et vers l’exportation par voie fluviale (C.Raynaud, non publ.). Cet engouement excessif pour la vigne eut pour effet d’après Domitien (en 92) une surabondance de vin accompagnée d’une pénurie de blé. Il ordonna donc, par édit, d’arracher au moins la moitié du vignoble provincial. Et si cet édit ne fut certainement pas suivi de faits en Narbonnaise, il ne fut cependant abrogé qu’à la fin du IIIème siècle par Probus.

Si au début la vigne était cultivée mariée à d’autres cultures (céréales ou oliviers), pendant le Haut Empire, la culture se spécialisa au sein de grands domaines viticoles (Ferdière, 1988). De plus, comme le mentionne Pline, les plantations de vignes en Narbonnaise se distinguent de celles des autres régions par une orientation oblique des rangs par rapport au vent de même que leur taille basse, toujours à cause du vent (ailleurs, elles étaient en espallier, en treille, ou encore courantes d’arbres en arbres).

Les cultures secondaires

Les fruitiers

  • Figuiers
  • Pommiers
  • Pêchers
  • Pruniers
  • Cerisiers
  • Noyers
  • Amandiers
  • Cognassiers
  • Grenadiers

Les plantes aromatiques

Les parfums :

 » La Romaine suivait les préceptes d’un code de beauté élaboré où le parfum jouait un rôle précis et astreignant… Le mélange des essences ne l’effrayait pas, elle possédait un grand choix de parfums. Celui que César utilisait sans se lasser, était le Télinium, légérement acidulé et épicé. Le miel, la marjolaine, le cynorhodon, le fenugrec et la mélisse étaient la base de sa composition, et pour qu’il soit tenace, le mélange s’opérait à l’aide de vin. » (Laurence Durrell – L’ombre infinie de César)

Les vins aromatisés :

Columelle, écrivain du Ier siècle, auteur du traité d’agronomie « Re Rustica », donne les indications pour préparer un vin d’absinthe (« Absinthianum vinum« ) avec, outre la grande absinthe (Artémisia absinthium), de l’hysope (Hyssopus officinalis), du thym (Thymus vulgaris), du fenouil (Foeniculum vulgare), et de la menthe Pouliot (Mentha pulegium). (Cavazza, in : Parfums de plantes, Paris, Décembre 1987 – Juin 1988)

Les plantes textiles et tinctoriales :

– Le lin (Linum), très courant sur les sols sableux, fait l’objet d’une taxe ; le chanvre (Cannabis sativa) qui donne des tissus grossiers et des cordages, est mentionné par Athénée vers 200 ap.n.è., en culture dans la vallée du Rhône ; le jonc, caractéristique des zones humides donne quant à lui des cordages ; enfin la mauve et l’ortie sont aussi citées comme plantes textiles.

Les plantes tinctoriales sont le nécessaire complément des textiles, en cela la garance (rubia tinctoria) dont la proche cousine pousse à l’état sauvage dans nos garrigues, s’illustre brillamment. Pline la mentionne comme cultivée dans toutes les provinces. Il indique également la guède ou pastel qui fournie un bleu courant en Gaule (Ferdière, 1988).

L’élevage

L’élevage considéré comme la seconde mamelle de l’économie rurale, occupait certainement une part importante des terroirs et de l’activité. Complémentaire de l’agriculture, il n’en est pas moins concurrent pour l’usage des sols. Il est coutûme de dire qu’en Méditerranée, l’agriculteur n’est pas éleveur, les cultures y sont trop fragiles.

Le pacage en sec se fait alors dans les friches, les garrigues ou les bois ; dans les zones plus humides, en bordure des ruisseaux, les prés verdoyants accueillent un cheptel plus vorace.

La transhumance a une fonction importante dans l’élevage extensif tel qu’il se pratique dans nos régions trop sèches en été pour offrir le moindre brin d’herbe aux troupeaux. Ils partent alors en estive, sur des chemins (drailles) similaires à ceux que l’on trouve encore aujourd’hui. Les origines de la transhumance en Provence sont attestées par la découverte de plusieurs dizaines de bergeries d’époque romaine dans la plaine steppique de la Crau dont l’étude à permis d’avoir un aperçu de l’élevage antique des ovins, de la vie quotidienne des bergers, mais aussi de l’organisation de ce territoire et de son exploitation depuis la création de la colonie d’Arles, jusqu’à la fin du VIe s. et le début du Ve s. (Badan et al, 1995)

Les cultures fourragères, (orge, vesce, ers, fenugrec, seigle, luzerne…) attestées par les fouilles archéologiques, complètent ce dispositif.

Si les ovicaprinés constituent toujours l’essentiel du cheptel, les analyses des ossements révélent que par rapport à la protohistoire, chèvres et moutons (fournissant viande, lait et textile) sont en déclin au profit du porc, la charcuterie gauloise est célèbre à Rome ; le boeuf quant à lui fournit la principale viande et la consommation de gibier se réduit (C.Raynaud, non publ.). A côté de ces espèces, volailles, chevaux, ânes, et chiens complètent l’éventail des animaux domestiques de l’Antiquité.

Les fromages de Nîmes

Pline l’Ancien dans le livre XI de son Histoire Naturelle nous apprend que : « Le fromage le plus estimé à Rome, où l’on compare sur place les produits de tous les pays, est, parmi ceux des provinces, celui de Nîmes, des pagi du Mont Lozère et du pagus des Gabales. »

« Laus caseo Romae, ubi omnium gentium bona comminus judicantur,, e provinciis Nemausensi praecipua, Lesrae Gabalicoque pagis. »

Cette mention des fromages nîmois sur les tables romaines a fait l’objet de nombreux commentaires et de multiples hypothèses dont il ressort que sous l’appelation de « nîmois » on trouverait certainement les fromages rutènes et gabales pour lesquels Nîmes jouait le rôle de marché de distribution. Cette hypothèse semble confirmée par l’existence d’une route romaine de Nîmes à Rodez ainsi que par le rôle que Nîmes a joué dans le commerce du sel (produit en Camargue), directement lié à la production fromagère. (In : Roman, 1974)

Le miel

Le rucher a une grande importance dans l’économie d’un domaine à l’époque romaine. Les agronomes lui ont consacré de longs chapitres et le nom de plusieurs traités d’apiculture nous sont parvenus.

L’utilisation du bois

Pendant l’occupation romaine (125 ans av.J.C. jusqu’au Vème siècle), la mise en oeuvre de la forêt et du bois dans l’économie agricole est très nette (Ferdière, 1988). Chaque villa se devait de posséder un bois sur ses terres.

Les besoins étaient multiples et certainement importants : bois de chauffe (pour le chauffage privé ou public dans les thermes par exemple) ; bois de feu pour l’industrie (tuilerie par exemple) et les fours ; bois de construction et charpente ; bois de charronnage (les Gaulois étaient connus pour leur habileté comme charpentiers et charrons) ; bois pour la construction navale, pour la tonnellerie, pour les meubles, outils, objets domestiques… A terme, même si à cette époque la forêt n’est plus simplement ouverte ou parcourue, mais fait l’objet d’une véritable gestion, ces prélèvements ont certainement eu un impact très fort sur le paysage (Darrac et col. ; Ferdière, 1988)

Il est notoire que le chêne vert joue toujours un rôle prépondérant à cette époque (cf. Lucie Chabal, 1992), son excellent pouvoir calorifique et sa facilité à rejeter de souche le classant parmi les bois d’une grande utilité, même si le chêne blanc le concurrence en noblesse et résistance pour les constructions.

Mais les arbres de la forêt « sèche » ne sont pas les seuls loin de là à être utilisés par les populations gallo-romaines. La ripisylve, dont les rives du Gardon offre de beaux exemples, fournit des bois indispensables. Aulne, bouleau, frêne, orme, mais surtout l’osier, [osier jaune (Salix alba), rouge (S.purpurea), vert (S.vimilis)] dont on emploie les rameaux flexibles pour tresser toutes sortes de vanneries. Corbeilles et paniers servent au transport des marchandises, mais on peut imaginer d’autres produits tels que des protections d’amphores dont on sait, étant donnée la finesse de leur paroi, qu’elles n’étaient certainement pas transportées nues.

A côté des bois, la forêt est une source potentielle d’alimentation pour l’homme ou son cheptel, glands, arbouses…, et un territoire de chasse très fréquenté.

Pré-inventaire des objets en bois de la Gaule-Romaine.

D’après P.Audin, in : « Le bois et la forêt en Gaule » 1985.

( * : essences présentes sur le site)

. Chênes* : Barque à fond plat, barque monoxyle, flotteur de radeau, pont (poutres, pieux, madriers), puits (cuvelages, plateau, madrier, margelle), poutre sablière, poutres de bassin à eau, lattes de clayonnage pour mur, planches, planchers, piloti (fondation de bâti), grosses pièces de charpente, piquet, traverses de canalisation, pompe à eau, statues, seau, chevilles.

. Châtaignier : Douelles de tonneau, statues, seau, fines éclisses pour panier tressé.

. Buis* : Petits gobelets, peignes doubles, fusaïole, peignes à carder.

. Pin* : Piloti (fondation de bâti), pieux (pont).

. Sapin blanc des Alpes (trés réputé) : Passerelle sur pilotis (Lattes), madriers de puits, statue.

. Frêne* : Coins de carrier, échelles, statues.

. Saule* : Corbeilles en vannerie, pieux de pont, frettage des tonneaux, mannequins (pour incinérer).

. Hêtre* : Statues.

. Bouleau* : Statues.

. Orme* : Piquets.

. Aulne* : Pieux (pont), seau (fond).

. Noisetier : Métier à tisser (2 tiges).

. Prunier* : Coupelles.

. If : Seau.

. Bruyère : Piquets.

. Eglantier* : Paniers tressés.

. Clématite des haies* : Bûcher

Véronique Mure, 1997

Bibliographie

AUDIN P.- Pré-inventaire des objets en bois de la Gaule romaine in : « Le bois et la forêt en Gaule », Caesarodunum XXI, Actes du colloque.- Ed. Errance, 1986, p 39-71.

CHOLVY G. et al.- Le Languedoc et le Roussillon. Civilisations populaires régionales.- Ed. Horvath., 1991.

FABRE (G.), FICHES (J.L.), PAILLET (J.L.).- L’aqueduc de Nîmes de le pont du Gard, 1991

FERDIERE (A).- Les campagnes en Gaule romaine.- 2 tomes, 1991, 301 p. & 283 p.

FICHES (J..L.).- Ambrussum, une étape de la voie Domitienne. – Ed. Les Presses du Languedoc, 1996, 94 p.

LEVEAU (P), SILLIERES (P), VALLAT (J..P.).- Campagnes de la méditerranée romaine.- Bibliothèque d’archéologie.- Hachette, 1993.

LE DANTEC (J.P.).- Jardins et paysages.- Larousse, 1996, 634 p.

MICHELET (C.).- Histoire des paysans de France.- Robert Laffont, 1996, 301 p.

PY (M.).-   Les Gaulois du Midi.- Hachette, 1993, 288 p.

ROMAN (D.).- « Les relations de Nîmes et les Rutènes d’après Pline l’ancien » in : Actes du 47ème congrès de la fédération historique du Languedoc, Rodez, 1974, p 41-46.

LATTARA (5).- « Recherches sur l’économie vivrière des lattarenses ».- Ed. de l’Ass. pour la Recherche Archéologique en Languedoc Oriental., 1992, 343 p.

 


 

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